close× Call Us Iraclis Spyrou : +32 476 51 16 01 Eddy Michel : +32 492 53 29 15

3 - Loire juillet 2011

Il est long le Chenin....

Nous profitons de la fermeture de juillet pour faire un saut en Touraine afin d'y rencontrer nos amis vignerons. Petite parenthèse préalable pour remercier François-Xavier Barc, ex-maître de chai et vinificateur au domaine Joguet depuis 2004 et qui par amitié nous a aiguillé vers la plupart des vignerons avec lesquels nous travaillons maintenant dans cette région. Merci Fx…

Domaine Carême à Vouvray : Vincent Carême nous attend dans ses caves de Vouvray. Le domaine (15 ha de chenin sur des sols argilo-siliceux et argilo-calcaires) n'est pas très ancien, puisque créé en 1999, mais Vincent a vite attiré l'attention de la presse spécialisée et des amateurs par la grande qualité de ses diverses cuvées. Il s'est hissé rapidement au top de l'appellation au côté de domaines tels que Foreau, Chidaine et Huet. Nous commençons la dégustation par les 2010 et nous goûtons les diverses cuvées qui vont constituer le Vouvray classique. Une grande partie est en cuve, et quelques barriques toujours en cours d'élevage. Les vins, dans la continuité des millésimes précédents, sont à la fois tendus, gras, purs et nets, marque de "fabrique" du domaine. Le millésime s'annonce bien équilibré, bien situé entre la grande pureté du 2008 et la richesse du 2009. Une fermeté et de très belles acidités qui augurent de lendemains qui chantent…. Nous découvrons ensuite les spécificités de deux très jolis terroirs, "Peu Morier" et "Le Clos".  Le Clos est un terroir réputé de l'appellation, mais Vincent l'a récupéré dans un état assez délabré. Gros travail donc pour tout remettre en état, replanter les manquants, et soigner un sol qui apparemment en avait besoin. Le potentiel est assez impressionnant, donnant des vins assez puissants qui nécessitent d'être travaillés et de longs élevages pour les dompter. Quelques années seront nécessaires pour arriver à en exprimer le grand potentiel, et donc c'est actuellement la cuvée à notre sens la moins aboutie. A suivre. Avec "Peu Morier" on entre dans la catégorie "grande classe". Tout ce que nous goûtons témoigne d'une race peu commune avec une longueur, un tranchant et une richesse aromatique qui en fait actuellement la cuvée porte drapeau du domaine. Pour l'instant la plupart des millésimes de cette cuvée sont cataloguées comme "tendres", conservant un sucre résiduel variable, qui ne cache en rien la race du terroir. Vincent voudrait arriver à en vinifier une partie en sec, mais pour l'instant la nature n'est pas d'accord avec lui …..Quand ce sera le cas, on risque d'avoir un très grand sec… On passe aux moelleux. Des vins qui "glissent", tant leur sapidité est évidente. Des arômes frais (coing, grosses groseilles vertes) et des réminiscences de fruits exotiques. Encore une fois, la grande force du domaine est de proposer des vins qui, de par leur côté aérien, ne fatiguent jamais. Quand l'année le permet, Vincent élabore aussi une "première trie" réellement impressionnante par sa race (on reconnait le terroir du "Peu Morier" au premier coup de nez) et une magnifique amertume. De la dentelle en bouteilles. Avis aux amateurs… On termine avec les bulles. Trois cuvées sont actuellement élaborées La cuvée T, provenant partiellement d'achat de raisins, nette et précise, très belles bulles et plaisir immédiat. Le Vouvray brut possède un surcroit de gras en plus des qualités précitées pour la cuvée T. La Cuvée Ancestrale n'a strictement rien à envier à un grand champagne. Provenant de plus vieilles vignes et des meilleurs terroirs, elle impressionne par son omniprésence en bouche, sa race et sa longueur. Impressionnant….et d'une très belle tenue puisque Fx venant d'arriver, Vincent nous ouvre en apéro (finie la dégustation…) un magnum de 2002 qu'il dégorge à l'instant et qui se révèle après aération d'une jeunesse phénoménale et d'une rare complexité. Il est tard, et on commence à avoir la dalle… Direction resto où la dégustation va se prolonger…tard dans la nuit….Mais ceci est une autre histoire…Vous trouverez sur le site actuellement en construction, une page intitulée : "Les bonnes adresses des vignobles" pour savoir où vous sustenter en compagnie de passionnés du vin.

Château Yvonne à Saumur-Champigny : Sur la commune de Parnay, Mathieu Vallée a repris en 2007 ce domaine créé en 1996. Une dizaine d'hectares équitablement répartis entre chenin et cabernet franc sur plusieurs parcelles sur sols argilo-calcaires et tuffeau. La pierre de tuffeau est une roche crayeuse tendre et poreuse qui abonde en Loire et qui a servi à la construction de nombreux châteaux ou habitations du 17ème au 19ème siècle. D'où ce paysage étonnant de maisons troglodytes et ces caves immenses où le vin est élevé et conservé à des températures idéales. Mathieu effectue un gros travail à la vigne travaillée en bio. Labours, taille courte, effeuillage, élimination d'une partie des entre-cœurs (bourgeons qui rendent le feuillage plus dense, empêchant les grappes d'être bien exposées au soleil) et intervient par contre très peu à la cave, laissant les vins s'affiner avec des élevages longs avant une mise en bouteille sans collage ni filtration. Le Saumur blanc est sans conteste un des plus grands blancs de Loire. Un vin intriguant, aux multiples arômes déroutants et évolutifs pendant les premiers mois qui suivent la mise en bouteille : vanille, tabac, dattes, pêche blanche, confiture de coing et agrumes se succèdent sur une trame vive et tranchante. Le 2008 nous avait enchantés par sa grande pureté minérale et le 2009 récemment mis en bouteilles suit le même chemin avec une matière plus riche. Le 2010 en élevage se situera vraisemblablement entre ces deux beaux millésimes.. Deux rouges différents sont produits au domaine : le Saumur-Champigny "La Folie" et le Saumur-Champigny "Château Yvonne". Château Yvonne est produit à partir des plus vieilles vignes et se démarque par une finesse plus marquée et une grande densité en bouche. Longue conservation à prévoir. La Folie est un Saumur-Champigny typique marqué par son terroir de tuf, très net et précis, mais qui a souvent besoin d'aération dans sa première année de vie en bouteille de par son côté puissant et structuré, même si la matière est charnue et grasse.

Domaine de la Cotelleraie à Saint-Nicolas de Bourgueil : attention, un frère peut en cacher un autre ! A la Cotelleraie, c'est Gérald qui le frère aîné de Mathieu qui mène ce domaine familial de 27 ha de main de maître. Bien décidé à amener les vins de Loire au niveau des grands rouges de France, Gérald, en charge du domaine depuis 1997, cherche à mettre tous les atouts de son côté. Les vendanges sont manuelles depuis 2004 (chose très rare dans cette appellation qui couvre un millier d'hectares) et le vignoble a été progressivement converti à la biodynamie…. Depuis, les divers guides ne tarissent plus d'éloges sur la gamme élaborés au domaine. Il faut dire que c'est amplement mérité, tant les vins sont purs avec un toucher de bouche superbe, mêlant délicatesse et raffinement, gourmandise et fraicheur, suavité et longueur. Les entrées de gamme proviennent des terrasses alluvionnaires, composées de sables et de graviers et mettent en avant des notes florales (violette) et fruitées (cerise, mûre, framboise). La cuvée "Perruches" sitiuée sur une couche épaisse de graviers et de crasse de fer possède un surcroit d'intensité aromatique (fruits noirs) et la bouche charnue et soyeuse se prolonge longtemps en finale. (vignes de 25 ans) Le "Vau Jaumier" (notre préféré) provient de vignes de plus de 20 ans sur terrasses argilo-calcaires. Délicat et raffiné, c'est un des plus beaux vins de l'appellation. Le 2009 est magistral. "L'Envolée" provient des plus vieilles vignes du domaine et profite d'un élevage plus luxueux (traduisez plus boisé…). Il est donc destiné aux personnes qui apprécient ce type d'élevage.

Complices de Loire : Et c'est ici que l'on retrouve François-Xavier Barc qui, après avoir passé quelques années à rétablir le lustre quelque peu défaillant du domaine Joguet, s'est associé à Gérald Vallée pour créer le premier négoce ligérien de qualité. Partant du constat que de magnifiques terroirs étaient sous-exploités et que de superbes raisins s'en allait grossir les cuves des coopératives, nos deux compères s'en sont allés traquer le petit coin de terroir splendidement situé, la vieille vigne oubliée ou négligée, et très vite (création en …2010) sous l'impulsion d'un Fx hyper motivé par cette nouvelle aventure, une première gamme a vu le jour : Chinon, Bourgueil, St-Nicolas, Saumur-Champigny, Sauvignon de Touraine. Des vins francs, nets, gourmands, bien typés des terroirs qui les ont vu naître, et à des prix très corrects. Le Sauvignon de Touraine "Pointe d'Agrumes" n'usurpe pas son nom et les Sancerre au prix souvent surestimé ont quelques soucis à se faire….et des questions à se poser….. Très joli Chinon "La Petite Timonerie", bien en chair et marqué par ses senteurs crayeuses et un joli fruit savoureux. Le Bourgueil "Les Castines" profite de son terroir de tuf pour exprimer un fruité élégant sur une structure plus ferme. Le Saint-Nicolas "Les Cannonières" est un vin gourmand et facile d'accès, excellente entrée en matière pour qui découvre les rouges de Loire. Le Saumur-Champigny "Les Roches Célestes" possède des tannins plus serrés et beaucoup de fraicheur. Belle évolution à prévoir. Un Montlouis et un Gamay vont aussi bientôt voir le jour. Très vite la sauce prend et avec elle l'idée d'évoluer en créant une deuxième gamme avec les plus jolis lots de raisins dénichés ça et là. En cours de création, cette gamme commence à voir le jour. Les 2010 dégustés nous ont fortement impressionnés en particulier un magnifique Saumur blanc et un Bourgueil très long et persistant.

En bref, une visite courte mais instructive qui va se terminer, comme d'habitude, par la découverte d'un bon petit resto tenu par un fêlé du vin, ce qui nous convient parfaitement….mais ne nous aidera pas à nous remettre de ces deux journées bien chargées !

                                                                                                                                                                                            Pierre Ghysens, Août 2011